Bruxelles, le 10 octobre 2024.
Aujourd’hui, Le Vif et Le Soir font écho à la campagne de demandes d’accès aux documents administratifs relatifs à la vidéosurveillance en Belgique que la Ligue des droits humains (LDH) et le collectif TechnopoliceBXL mènent en partenariat depuis deux ans.
Depuis février 2022, des requêtes ont été envoyées à l’ensemble des 287 communes et 82 zones de police de Belgique francophone pour mettre en lumière le déploiement alarmant des technologies de surveillance dans la capitale comme en Wallonie. En août 2024, des journalistes des rédactions de l’hebdomadaire Le Vif et du quotidien Le Soir ont rejoint la campagne de collecte, en relançant systématiquement les communes francophones à l’approche des élections communales du 13 octobre prochain.
Il a fallu mener une bataille acharnée pour obtenir des réponses, mobiliser des moyens humains considérables et relancer régulièrement les autorités concernées. Cette persévérance a finalement porté ses fruits, mettant en lumière une généralisation inquiétante de la vidéosurveillance, des bodycams, des drones et de l’analyse automatisée des images. Cette vidéosurveillance algorithmique s’appuie principalement sur le logiciel israélien BriefCam, doté de capacités de reconnaissance faciale – dont il est impossible de savoir à l’heure actuelle dans quelle mesure et à quelle fréquence, la police y a recours.
La multiplication des technologies de surveillance constitue une fuite en avant inquiétante, révélant un désir de contrôle qui s’inscrit dans une logique autoritaire. La surveillance est pourtant largement inefficace et ne résout pas les innombrables problèmes pour lesquels elle est mise en place. Ces dispositifs ne font en réalité qu’alimenter une machine répressive qui vise à soumettre et dominer plutôt qu’à protéger.
La surveillance résulte d’une vision politique sécuritaire qui considère tout·e individu·e comme suspect·e par défaut. Au lieu de garantir notre sécurité, cette approche engendre un climat de méfiance et d’angoisse, où chaque geste peut être surveillé et analysé. Nous dénonçons cette obsession de la surveillance qui, sous couvert de sécurité, justifie des atteintes à notre liberté et à notre autonomie. La vraie sécurité ne peut se construire sur la méfiance et la répression, mais sur la solidarité et le respect des individus.
Voilà pourquoi il est crucial que l’État rende des comptes, car la concentration de pouvoir sans visibilité démocratique entraîne inévitablement des abus et des dérives. La transparence n’est pas une simple formalité, mais une nécessité pour éviter que les décisions soient prises dans l’ombre, loin des intérêts de celles et ceux qu’elles impactent. Lorsque l’État échappe à tout examen, il devient un acteur opaque, et s’enfonce dans des logiques de domination et de contrôle, au détriment des valeurs d’égalité et de solidarité. En exigeant des comptes, nous affirmons notre droit à comprendre les mécanismes de pouvoir qui régissent nos vies et à agir contre toute forme d’oppression qui pourrait en découler. C’est en créant des espaces de critique que nous pouvons espérer construire une société où le pouvoir est partagé et non imposé.
La vidéosurveillance s’est aujourd’hui imposée comme un enjeu central de la campagne électorale, où tous les partis politiques semblent se précipiter dans une fuite en avant technologique, proposant des mesures sécuritaires qui masquent une véritable impasse. Au lieu d’interroger le modèle de société qui engendre cette nécessité perçue de surveillance, le discours dominant se concentre sur l’extension des dispositifs de contrôle, renforçant ainsi un climat de méfiance généralisée. Cette course technosolutionniste ne répond pas aux véritables enjeux de notre époque, qui résident dans la construction d’espaces basés sur la confiance, la solidarité et la justice sociale. L’urgence n’est pas de multiplier les caméras, mais de remettre en question un système qui privilégie la répression au détriment de l’émancipation collective.
À propos du collectif TechnopoliceBXL
Depuis 2019, la campagne Technopolice documente et critique les projets de « smart city » et la prolifération des technologies de surveillance en France et en Belgique. Fondé en janvier 2021, l’objectif du collectif TechnopoliceBXL est de rendre visibles les menaces liberticides que représentent ces outils de contrôle en région bruxelloise, en centralisant l’information les concernant sur une plateforme accessibles à tout·es. Au travers de ce travail informatif, nous souhaitons donner à chacun·e la possibilité d’appréhender ces enjeux, de bâtir des outils et des stratégies de résistance contre la surveillance, afin que le déploiement de ces outils policiers s’enraye, que la militarisation de l’espace public soit mise en échec et qu’in fine, la technopolice trépasse!